Maîtriser les mobilités internes, de l’identification du potentiel à la prise de poste.

Dans un contexte de tensions durables sur le marché du travail et d’exigences accrues de fidélisation des talents, la mobilité interne s’impose comme un levier stratégique incontournable pour les directions RH. Développer les parcours internes permet non seulement de répondre aux aspirations des collaborateurs, mais aussi de réduire le turnover et d’optimiser les coûts de recrutement.
Et pour cause : le coût d’un recrutement externe est aujourd’hui en moyenne deux fois plus élevé qu’un parcours de mobilité interne. Un argument de poids dans un contexte où les budgets RH sont souvent sous pression. Structurer une politique de mobilité, c’est donc aussi une source directe de ROI pour les entreprises.
Pourtant, malgré ces avantages évidents, peu d’organisations ont aujourd’hui une démarche formalisée, outillée et partagée autour de la mobilité interne. Comment passer d’une logique opportuniste à une approche pilotée, fluide et performante ? C’est à cette question qu’ont répondu Thibault Vilon, CEO d’Elevo, et Alexandre Grenier, CEO de Workelo, lors d’un webinar croisé riche en enseignements.
Pourquoi la mobilité interne est-elle encore peu structurée ?
Selon une étude myRHline de 2022, 49% des entreprises jugent leur politique de mobilité interne sous-développée. Et cela n’a rien d’étonnant. Les freins sont nombreux : manque de visibilité sur les opportunités, absence de plan de carrière formalisé, culture de la stabilité ou encore peur des managers de “perdre leurs talents”.
Alexandre Grenier souligne un point clé : dans les entreprises peu matures, les salariés ne savent pas toujours qu’ils peuvent évoluer en interne. Et quand bien même ils le sauraient, rien ne les y encourage formellement.
Mais surtout, comme le rappelle Thibault Vilon : “Ce n’est pas qu’on déplace un recrutement, c’est qu’on évite un départ.” Autrement dit, la mobilité interne n’est pas un simple jeu à somme nulle. Elle permet de fidéliser les talents et d’anticiper leurs aspirations, plutôt que de les voir partir ailleurs.

Identifier les bons profils au bon moment : la donnée RH au cœur du process
Pour structurer une politique de mobilité, tout commence par une bonne détection des potentiels. Thibault partage ici les leviers activables chez Elevo :
• Des process RH solides : Des entretiens annuels, semestriels et People Reviews bien menés permettent de capter des signaux (envies d’évolution, aspirations, potentiels, risques de départ).
• Des outils adaptés : Une plateforme comme Elevo permet de centraliser, structurer et objectiver les discussions RH, avec les bonnes questions posées aux bons moments.
• Des données RH actionnables : Par exemple, croiser performance, potentiel, risques de départ et impact du départ pour prioriser les actions.
• Un cadre flexible, pas figé : Inutile d’attendre une grille de compétences parfaite. Il est possible de commencer simplement, et d’enrichir ensuite.
"Ce que nous avons constaté comme levier particulièrement puissant pour structurer la mobilité interne, c’est l’exercice des People Reviews. Cet exercice permet de poser des questions très précises : évaluer la performance d’un collaborateur, son potentiel, ses aspirations à la mobilité, ou encore les risques de départ… autant de critères essentiels.
En menant cet exercice, on obtient des données très riches, qui permettent d’identifier à la fois les talents à fort potentiel susceptibles de partir." - Thibault Vilon, CEO d'Elevo.
Formaliser un parcours de mobilité fluide : offboarding + onboarding = crossboarding
Une fois la mobilité validée, encore faut-il l’accompagner. Et c’est bien souvent là que le bât blesse.
Alexandre Grenier insiste : “On ne peut pas se contenter de valider un changement de poste. Il faut créer un vrai parcours d’accompagnement, comme pour un onboarding classique.”
Le “crossboarding”, ou parcours de transition, comprend deux volets :
• Un offboarding structuré : passation, documentation, bilan du poste quitté, célébration du parcours passé.
• Un onboarding sur le nouveau poste : accueil dans l’équipe, formation, clarification des attentes, accompagnement terrain.
Ce travail de transition limite les risques d’échec. Il rassure aussi les collaborateurs et encourage les prises de poste réussies.

Former et impliquer les managers : une clé de succès
Les managers sont à la fois acteurs et leviers de la mobilité interne. Ils doivent :
• Identifier les potentiels dans leur équipe,
• Avoir des discussions régulières sur les souhaits d’évolution,
• Encourager les mobilités, même au détriment de leur propre périmètre.
Mais, ce rôle ne s’improvise pas. Il nécessite :
• De la formation au feedback et aux discussions de carrière,
• Des outils qui facilitent les revues de talent et la prise de décision,
• Une culture d’entreprise qui valorise les mobilités réussies (et les managers qui y contribuent).
Thibault le résume ainsi : “ Le rôle d’un manager est aussi de permettre à ses collaborateurs de grandir, même si c’est ailleurs dans l’entreprise.”
Créer une culture de la mobilité
La mobilité interne ne doit pas être perçue comme une exception mais comme une norme valorisée :
• Côté collaborateurs : rassurer, accompagner, encourager les démarches.
• Côté managers : valoriser ceux qui soutiennent la mobilité, intégrer des indicateurs RH liés au développement des collaborateurs dans leurs objectifs.
• Côté organisation : communiquer, formaliser, ritualiser les parcours internes.
"J’ai récemment revu l’ancienne DRH d’une grande entreprise, qui à l’époque travaillait très bien avec ses équipes sur la mobilité. Ils avaient mis en place, avant même d’avoir les process et les outils, une véritable communication pour créer une culture de la mobilité interne. L’idée, c’était de faire comprendre que la mobilité est une bonne chose, qu’il faut la valoriser aussi bien du côté des collaborateurs qui bougent que des managers qui acceptent de les laisser partir. Et c’est ça qu’il ne faut pas l’oublier : nos managers peuvent être de précieux alliés dans cette démarche, mais aussi, parfois, des freins si la culture de la mobilité interne n’est créée." - Thibault Vilon, CEO d'Elevo.
Ce qu’il faut retenir
La mobilité interne ne s’improvise pas. Elle se structure à travers une combinaison de culture, de données RH, de process, et d’outils d’accompagnement.
Voici les 6 leviers identifiés pour une politique de mobilité interne efficace :
1. Définir une stratégie claire : ambitions, critères, culture.
2. Préparer les collaborateurs : leur donner de la visibilité et de la confiance.
3. Outiller les managers : pour accompagner et détecter les potentiels.
4. Fluidifier les processus : grâce à des outils de crossboarding et de People Review.
5. Accompagner la prise de poste : onboarding structuré même pour un poste interne.
6. Mesurer et ajuster : analyser les mobilités réussies ou non, affiner le modèle.
Un dernier chiffre pour finir ? Selon LinkedIn, 63 % des collaborateurs préféreraient évoluer en interne plutôt que de changer d’entreprise. La balle est donc dans le camp des RH pour faire matcher attentes des collaborateurs et ambitions de l’organisation.


